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Interview de Philippe VACHET : La QVT de demain sera très différente de celle d’aujourd’hui, elle sera plus ancrée dans les valeurs sociétales et environnementales des personnes.

11 minutes
Interview
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Bonjour, pouvez-vous nous parler de vous ?

Je suis le Directeur des Opérations de l’Agence LUCIE. Après avoir été directeur d’entreprises industrielles, puis consultant formateur indépendant durant 10 ans. J’ai choisi ensuite, il y a bientôt 3 ans, de revenir au salariat pour retrouver justement une Qualité de Vie au Travail remplie d’échanges entre collègues, ce qui me manquait vraiment durant ma carrière d’indépendant.

Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre Entreprise ?

L’Agence LUCIE est spécialisée en RSE/RSO. Elle propose des solutions adaptées à toutes les organisations, TPE/PME, Grandes Entreprises, Collectivités, Associations pour faire progresser leur démarche RSE/RSO (Responsabilité Sociétale des Organisations), au travers en particulier du label LUCIE 26000, premier label RSE en France, créé en 2007. Nous proposons aussi un label de premier niveau RSE et des labels spécifiques sur le Numérique Responsable et l’environnement. Nous accompagnons nos clients également au travers d’un centre de formation ouvert à tous, du chercheur d’emploi au Responsable RSE de grandes entreprises, sur toutes les thématiques de la RSE/RSO (Gouvernance, Droits Humains, Relations et Conditions de Travail, Environnement, Ethique des Affaires et Intérêts des Consommateurs, Développement Local et Intérêt Général)

QVT, bien-être au travail, les termes se confondent de plus en plus… Concrètement qu’est-ce que la QVT ?

Pour moi la Qualité de Vie au Travail correspond à plusieurs éléments d’une démarche RSE qui ont pour conséquence, outre le fait que les collaborateurs se sentent mieux dans leur job. La QVT est un élément essentiel de la performance d’une entreprise. Et par ailleurs, même si le travail, par définition, est une contrainte, la QVT c’est faire en sorte que ce travail se fasse dans des conditions acceptables et favorables pour tous.

Sinon en termes précis, le référentiel LUCIE 26000 identifie en particulier les points suivants :

  • Conditions matérielles, confort et bien-être au travail de tous les collaborateurs

  • Organisation et management clair et responsable

  • Accessibilité des salariés au lieu de travail

  • Télétravail

  • Equilibre vie professionnelle, vie personnelle

  • Accompagnement des grands changements

Et au-delà, c’est traiter aussi peut-être d’autres sujets RSE de la thématique des relations de travail :

  • Créer les conditions du dialogue social sous toutes ses formes

  • Protéger la santé et la sécurité de tous les collaborateurs

  • Développer les compétences de tous les collaborateurs

  • Assurer un système de rémunération équitable et transparent

Pourquoi est-il important aujourd’hui de mettre en place une démarche QVT ?

C’est un élément essentiel d’une démarche RSE et je vais tout simplement rapprocher les atouts de la QVT aux atouts de la démarche RSE :

  • Performance globale de l’entreprise, c’est-à-dire mesurée sur le long terme.

  • Fidélisation des collaborateurs qui sont ainsi plus performants et permettent de réduire les coûts de recrutement.

  • Amélioration de l’attractivité de l’entreprise pour recruter, à l’heure ou toutes les entreprises ont des soucis de recrutement, c’est un atout de choc de la démarche RSE et des labels RSE en général.

  • Amélioration de la qualité de relations avec ses clients, ses fournisseurs, ses partenaires. Les collaborateurs d’une entreprise sont en relation avec l’extérieur, quelle image souhaitez-vous donner ? Celle d’une entreprise qui respecte les valeurs de réussite de 1840 ? sans doute pas… donc la QVT est indispensable !!

  • Amélioration de l’innovation, proactivité, anticipation… parce que des collaborateurs qui se sentent mal dans leur travail ne se concentrent plus que sur leurs tâches et n’ont pas le recul nécessaire pour contribuer aux progrès.

  • … et bien d’autres raisons encore… comme tout simplement prendre acte que l’entreprise a un rôle social essentiel et qu’à se titre elle se doit de respecter et de favoriser le bien être de chacun.

QVT, QVCT, Happiness Management, Management bienveillant, ... En fait, tout n'est-il pas qu'une histoire de Management ?

Pas seulement, en tout cas pas seulement pour les managers en place à un instant T. Il faut beaucoup de temps pour créer une culture d’entreprise bienveillante, c’est lié à la nature des recrutements, au mode de fonctionnement du dirigeant, certes, mais aussi à l’état d’esprit des collaborateurs eux-mêmes qui vont pouvoir faire en sorte qu’une ambiance soit plus agréable ou pas. Mais tout cela est aussi une « alchimie » bien complexe où est bien prétentieux celui qui dit savoir comment faire. Nous proposons des choses, travaillons dans une direction, mais il n’y a pas de recette miracle, on parle de relations humaines, rien n’est plus complexe. Par exemple une entreprise qui a de faibles moyens financiers n’est pas pour autant une entreprise ou il ne fait pas bon vivre. Si chacun se soutien mutuellement, si le management est à l’écoute et fait de son mieux pour aider chacun, la QVT en sera meilleure, avec « les moyens du bord ».

Pour quelles raisons une réflexion stratégique de la QVT dans une entreprise peut-elle nourrir la marque employeur et l’expérience collaborateur ?

Au même titre que la démarche RSE dans son ensemble aujourd’hui, nous constatons que de plus en plus de personnes attachent une grande importance aux valeurs que partage l’entreprise ou l’organisation qui l’emploi. Par exemple l’éthique des affaires va être très positive pour un acheteur ou un commercial, pour qui les pratiques douteuses sont des situations de stress, de perte de confiance en leur employeur… l’environnement est désormais une valeur partagée du plus grand nombre et qui fait qu’on est fier d’appartenir à une entreprise qui contribue à un monde plus respectueux de la nature… le respect des personnes est de toute évidence un élément clef. C’est d’ailleurs pour de nombreuses entreprises la marque employeur qui va être l’objectif premier d’une démarche RSE et d’une labellisation en particulier, pour justement montrer aux salariés et futurs salariés que l’entreprise partage des valeurs sociales et environnementales.

On parle de qualité de vie au travail, mais le travail s'est massivement immiscé chez nous, que ce soit avec le télétravail ou les outils de communication. Quels en sont les impacts et comment garder un bon équilibre ? 

C’est un sujet complexe qui a bousculé tout le monde il est vrai. D’un avantage que n’accordaient que certaines entreprise pionnières, le télétravail est devenu une norme dans le monde des services et même une contrainte pour ceux qui n’ont pas de lieux de travail adapté ou qui ont besoin, plus que d’autres, de contacts humains. Il est donc indispensable que le télétravail soit l’objet d’un dialogue avec tout le monde. Il implique aussi des questions plus complexes de cohésion d’équipe, quand certains ne se croisent jamais par exemple. Ce doit donc vraiment être un sujet d’échanges régulier pour évoquer les conséquences positives et négatives qu’il implique. Cependant, il faut reconnaitre que c’est un progrès sur le plan environnemental (moins de déplacement globalement) et pour le confort de chacun (moins de temps de déplacement), tout en étant un risque de soucis sur l’équilibre vie pro/vie perso, d’où l’importance des définir des règles non pas de droit à la déconnexion mais de devoir de déconnexion. Comme l’interdiction pour un manager de contacter ses collaborateurs en dehors des horaires, même s’il voit que la personne est connectée.

Pensez-vous que le bien-être au travail devrait être une obligation légale au même titre que la santé ? 

C’est très dangereux de l’envisager il me semble. Quoi de pire que la dictature du bonheur ? Vous seriez contraint d’être de bonne humeur pour travailler dans une entreprise ? Je pense qu’il faut aussi respecter le droit à être grincheux parfois. La qualité de vie au travail est une force exemplaire des entreprises qui vont réussir et s’imposera à tous. Il faut définir des règles et des lois pour encadrer non pas la QVT mais le respect des droits. Certains aspects liés à la QVT peuvent faire l’objet de lois par contre, comme c’est le cas pour l’obligation de formation par exemple, le droit à la déconnexion, au dialogue social, au respect et au refus du harcèlement etc…

Comment voyez-vous l’avenir de la QVT ?

La QVT est et sera toujours subjective car issue du ressenti des personnes. De ce fait, elle évoluera en fonction de la société et de ses contraintes. La QVT de demain sera très différente de celle d’aujourd’hui, elle sera plus ancrée dans les valeurs sociétales et environnementales des personnes.

Un petit mot pour terminer ?

Belle journée ! 😊